lundi 21 septembre 2015

[Avis en vrac] Vus et revus en 2015 #6

Dheepan, de Jacques Audiard (2015)



AU CINÉMA - ACTUALITÉS



Dheepan, de Jacques Audiard (2015)

Il semblerait que le nouveau Jacques Audiard déchaîne les foudres, quoique personnellement je pense qu'il faille en attribuer une bonne partie au classique revers de la médaille de la Palme d'Or. Mais Dheepan, c'est quelque part un film qu'il faut aborder sous le bon angle, et peut-être pas depuis le prisme finalement assez déformant du film social, exercice auquel il aurait pu se prêter. Car bien que film tout de même très politique, au constat sévère, c'est surtout une histoire, avec des fulgurances plus ou moins fantastiques, qui est racontée (il faudrait d'ailleurs peut-être repenser à l'ancien titre, "L'homme qui n'aimait plus la guerre"). En mêlant le réel à l'irréel, Audiard est délibérément ambigü sur la nature de son film, jusqu'à même son (remarquable) final, en conjuguant cela évidemment à un sens formel hors-du-commun. Et bien qu'on puisse trouver parfois quelques facilités ou encore sûrement des imperfections sur lesquelles certains s'acharneront, elles contribuent peut-être aussi au charme du film, en témoignant de la complexité du projet. Mais il faut bien admettre qu'Audiard y a mis, d'une manière ou d'une autre, tout son cœur, et surtout toutes ses tripes.

Fiche Cinelounge


Mission Impossible - Rogue Nation, de Christopher McQuarrie (2015)

Après la très grande réussite de Ghost Protocol, il fallait avoir bien du courage pour essayer de faire mieux que Brad Bird. Mais si ma confiance en McQuarrie, scénariste de renom mais réalisateur peut-être moins achevé, était limitée, force est de croire que j'étais dans l'erreur. Il signe avec Rogue Nation un film d'action d'une assez grande maîtrise, peut-être au point d'être le meilleur opus avec le volet de DePalma. C'est un film où il y a un vrai sens de l'écriture pour amener l'aventure, ou les mésaventures du personnage d'Ethan Hunt. Point culminant atteint, évidemment, lors d'une scène remarquable à l'opéra en forme de remake du climax de L'Homme qui en savait trop (la version de 1956), sur fond de Nessun Dorma. Magistral. Et n'est-ce pas merveilleux, quelque part, d'avoir un film qui, de la sorte, fait cet hommage à Hitchcock, dans une licence cinématographique initialement entamée par DePalma ? 2015 apparaît comme un sacré cru d'action, et c'est assez rare pour qu'il faille le mentionner. Et enfin Tom Cruise, quel homme!

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The Program, de Stephen Frears (2015)

Derrière ses airs de biopic "à la mode", le dernier film de Stephen Frears se paye tout de même un des scandales les plus intéressants de l'époque contemporaine. Parce que si la culpabilité de Lance Armstrong a aujourd'hui été reconnue, le personnage n'en reste pas moins passionnant, et ça Frears l'a très bien compris. The Program est de la sorte un film sur un coureur qui ne voulait que gagner quand c'était impossible, alors corrompu par un système qui lui a donné la possibilité d'être champion. C'est presque un personnage qui pourrait être quelque part entre le Mark Zuckerberg de The Social Network (film avec lequel le scénario du Frears, au ton parfois "sorkinien", partage quelques similitudes de traitement) et le Chris Kyle d'American Sniper... Et en dépit de ses agissements parfois hautement contestables, c'est un humain que jamais Frears ne méprise, plutôt fasciné par la personne, ses complexes et contradictions. C'est juste l'histoire d'un type qui s'est noyé dans le grand mensonge qu'était son rêve. En parallèle, Stephen Frears s'offre également quelques superbes scènes de course de vélo, peut-être trop rares tant elles sont remarquablement bien filmées, avec une touche d'esthétisme et une adrénaline qui pourrait presque convoquer Rush. Belle déconstruction d'un rêve américain chiqué.

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Life, d'Anton Corbijn (2015)

Bien décidé à suivre de très près la (nouvelle) carrière de Robert Pattison, Life était un projet qui captait toute mon attention, cumulant à la fois réalisateur et acteur idéaux pour la (dé)construction d'un mythe de la jeunesse par la photographie. Cependant, quelque chose s'égare en route et le film de Corbijn perd peut-être davantage en intérêt au fur et à mesure qu'il se recentre sur James Dean. Car c'est là tout le reproche que j'ai sûrement à faire au film : James Dean. Outre le personnage, peut-être un peu trop plat pour que l'on s'y intéresse franchement, c'est surtout l'interprète Dane DeHaan qui plombe l'ensemble, enfermé dans la singerie de l'idole. Et immédiatement il y a un énorme décalage qui se créé avec Pattison, d'ailleurs fabuleux, et surtout libre de ne rien avoir à imiter. J'en viens alors à regretter que Corbijn n'ait pas laissé le personnage de Dean comme une ombre au-dessus du récit, une sorte de silhouette qui échappe toujours aux protagonistes du film, un personnage fuyant et insaisissable comme le décrit justement Pattison lui-même, en recentrant le récit sur le personnage de ce dernier, façon Inside Llewyn Davis. Malgré tout, Life reste un film intrigant dans les thématiques qu'il entreprend sur l'image, sur jouer, et sur la société américaine, car Corbijn est un cinéaste doué dans la dissection du vide existentiel de ses personnages, en plus d'être tout simplement un excellent metteur en scène (ici d'autant plus relevé par la très belle photographie de Charlotte Bruus Christensen). Mais même s'il en reste une œuvre intéressante, difficile de cacher tout de même une certaine déception.

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Le Tout Nouveau Testament, de Jaco Van Dormael (2015)

On s'accordera sûrement tous à dire que l'idée de base est géniale, Dieu péquenaud de première classe qui passe son temps à faire chier l'humanité. Mais comme souvent, avec les idées du genre, c'est assez facile que le soufflé s'effondre, ce qui est plus ou moins le cas du Tout Nouveau Testament. Mais pas complètement non plus. En fin de compte il y a peut-être avant tout un problème de scénario, qui a ses deux tiers, tourne en rond jusqu'au point d'en devenir parfois passablement laborieux, pour ne pas dire ennuyeux. L'idée d'apparence géniale est peut-être plus complexe que prévue à exploiter, et l'on s'en rend compte quand les séquences les plus géniales viennent directement tutoyer les moins convaincantes. Le ressenti est un alors un peu confus... Est-ce raté ? Est-ce à moitié réussi ? C'est tout de même intrigant. Dommage peut-être que, malgré quelques riches idées de mise en scène, Van Dormael reste parfois trop discret, d'autres fois peut-être trop directement dans la mimique de quelques fulgurances stylistiques tirées de Jean-Pierre Jeunet. Tout converge vers le mitigé, mais avec un certain soupçon d'agréable pour que le film mérite malgré tout d'être vu.

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The Dead Lands, de Toa Fraser (2014)

Vu exceptionnellement en salle, mais c'est un DTV.

Une fresque guerrière et sanglante Maori, c'est une proposition de cinéma que l'on ne voit pas tous les jours. Difficile de ne pas repenser au fabuleux Apocalypto, mais c'est tout à l'honneur de The Dead Lands qui expose justement cette singulière ambition. Imparfait dans son écriture, aux séquences parfois lourdingues, ou dans sa réalisation peut-être parce qu'il tâtonne un genre peu représenté, c'est tout de même assez exotique et surtout suffisamment direct, brut de décoffrage, pour gagner la sympathie du spectateur désireux d'embarquer pour ce périple bien bourrin aux confins d'un monde où l'on a tout à découvrir.

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Miss Hokusai, de Keiichi Hara (2015)

L'idée d'une production d'animation en rapport avec l'univers du peintre Hokusai a tout pour être intéressante. D'autant plus que Miss Hokusai s'intéresse à la fille de l'artiste, alter-égo dans l'ombre du paternel. Mais dans les faits, le film demeure hélas très décevant. La narration, globalement trop mal pensée, est incomplète, et à aucun moment les personnages ne parviennent à exister. Ainsi, l'émotion ne communique pas. Formellement, le film a de quoi laisser dubitatif, entre cette patte graphique très pauvre, malgré les citations picturales, ponctuée par quelques plans en 3D fort laids, trop souvent alourdis pas une musique omniprésente et pas forcément bien composée, notamment les morceaux rocks très génériques et un peu hors-sujet. Au ressortir, on a vraiment l'impression d'un sujet complètement gâché, c'est dommage, car ça et là dans le film, on distingue parfois quelques jolis moments ou jolies intentions.


Fiche Cinelounge


N.W.A. - Straight Outta Compton, de F. Gary Gray (2015)

Ça n’était sûrement qu’une question de temps avant que le groupe culte N.W.A. ne passe à la moulinette du biopic, inévitable machine à succès commerciaux qui, une fois de plus, fait ses preuves, vu le succès outre-Atlantique du nouveau film de Felix Gary Gray. Portrait hagiographique au possible, au point d’en devenir parfois fort générique, N.W.A. – Straight Outta Compton n’est qu’une plate transposition de la success story du groupe. Sans être toutefois désagréable ni franchement raté, il laisse pourtant l’amère sensation d’un film qui passe à côté de son sujet pour devenir un long spot promotionnel de deux heures vingt.

Critique à lire sur Filmosphere :
http://www.filmosphere.com/movies/n-w-a-straight-outta-compton-f-gary-gray-2015

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La Nina de Fuego, de Carlos Vermut (2015)

Je ne peux que rester de marbre devant la pluie d'éloges reçues par La Nina de Fuego. Désespérément, j'aurais voulu aimer le film, pétri de bonnes intentions, mais dont je suis ressorti profondément ennuyé. Ennuyé par sa platitude ambiante, sa froideur trop facile, sa vacuité trop exposée. On a tous quelque part très bien compris où Carlos Vermus voulait en venir, mais dans sa démarche il en fait tellement trop qu'il perd l'intérêt de son film. Sa sobriété devient trop austère, voire presque repoussante à travers l'absence plus ou moins prononcée de direction de la photographie, quand, en parallèle, le montage paraît presque un peu gadget. Vermut tient pourtant çà et là de beaux moments, de bonnes idées évidemment (le mélange des "genres", ce que l'on montre ou l'on ne montre pas...), et surtout un beau casting, savamment dirigé. Mais pas assez pour affronter l'ennui plus ou moins colossal qu'est susceptible de procurer le film, hélas.

Les plus curieux pourront toutefois découvrir ma petite interview du réalisateur, Carlos Vermut, et de l'actrice Barbara Lennie, sur Filmoshere (où vous pourrez d'ailleurs trouver une critique de Nicolas Gilli autrement plus enthousiaste que moi !).

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Prémonitions, d'Alfonso Poyart (2015)

Je pense sincèrement qu'Anthony Hopkins devient sénile, enchaînant les pires navets possibles. Car comment ne pas se douter, devant le scénario de Prémonitions, qu'il s'agit d'un navet pur et dur ? Outre son écriture désolante et incohérente, chimère arriérée de Minority Report et The Dead Zone, accumulant tous les clichés possibles d'une enquête policière et du concept de la précognition, le film n'a rien pour lui, à tel point que c'en devient presque amateur. La réalisation bat tous les records tant la caméra semble parfois se placer de manière totalement aléatoire, jamais réfléchie, avec un cadrage plus qu'approximatif. La musique, omniprésente, constituée de couches électroniques plus ou moins inaudibles, est atroce. Enfin, bouquet final, un Colin Farrell absent, mollusque, dans un film qui vient (une nouvelle fois) entacher sa filmographie, lors  d'une année où pourtant il aurait pu prétendre au prix d'interprétation grâce à The Lobster... Comment peut-on financer un projet aussi nul et amateur ?



AU CINÉMA - RESSORTIES


La Horde sauvage, de Sam Peckinpah (1969)

Revisionnage - Retrospective Sam Peckinpah à la Cinémathèque française

Pas la peine d'y aller par quatre chemins, La Horde sauvage est un des plus grands piliers du cinéma américain moderne. Dans cette concentration de violence physique et morale, Peckinpah dresse le portrait de toute une Amérique malade aux héros brisés. C'est un film où les héros ont mal au dos. Scorsese disait du film que les images de violence lui rappelaient à l'époque ce que l'on voyait quotidiennement à la télévision sur le Vietnam. Et quarante-cinq ans après ces images paraissent encore d'actualité, au-delà de l'esthétisme propre à Peckinpah, elles suintent encore le réel, celui d'un monde qui ne s'est pas encore affranchi de cette violence (et d'ailleurs c'est sûrement la matrice de la fusillade selon Michael Mann, également). Au panthéon du western, il a peut-être un des plus beaux castings possibles (Ryan, Holden, Borgnine, Oates...), certains magnifiquement trop vieux pour le rôle. Et puis, c'est peut-être le film qui a la réplique d'ouverture la plus programmatique de toute l'histoire du Cinéma, et ça n'est pas peu de le dire : "If they move, kill'em !".

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La Cité des dangers, de Robert Aldrich (1975)

Aldrich tardif, méconnu et globalement mal-aimé, La Cité des dangers n'est sans doute pas dans le panthéon de son auteur, mais est pourtant un beau film bien marqué par le Nouvel Hollywood. Peut-être est-on trop étouffé par cette noirceur ambiante, ce quotidien où tout est pourri jusqu'au héros lui-même, ce pauvre flic qui ne rechigne pas à enterrer des affaires. Une fois de plus on se retrouve face à un de ces films qui dissèque le mal-être de l'Amérique à l'heure de ses dérives les moins avouées. Et même si ça n'est pas le plus brillant du genre, il le fait quand même intelligemment, avec toute la sagesse de son réalisateur, qui au passage, sait tout de même remarquablement bien filmer Catherine Deneuve.

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Un jour sans fin, de Harold Ramis (1993)

Revisionnage.

Classique parmi les classiques. Harold Ramis n'aura malheureusement jamais su faire mieux ou même aussi bien qu'Un jour sans fin. Sans être nécessairement un modèle cinématographique, c'est toutefois une leçon d'écriture, entre le rythme de l'humour et la création de ses personnages enfermés dans cette affreuse boucle temporelle. Évidemment, c'est le rôle parfait pour l'acariâtre Bill Murray, que l'on aime détester comme souvent. C'est peut-être dommage que la réalisation ne soit parfois pas plus audacieuse, malgré une poignée de plans marquants (sur le réveil notamment), et malgré un montage qui lui, fait vraiment mouche. Enfin, on ne s'en lasse pas.

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EN VIDÉO


Aloha, de Cameron Crowe (2015)

Il semblerait que le destin s'acharne contre le dernier film du sympathique Cameron Crowe, puisqu'en plus de son lynchage en place public, Aloha jouit d'une annulation de sortie en salle par chez nous. L'incompréhension est de taille face à un film à la douceur rare, confirmant le don du réalisateur de Jerry Maguire pour le feel-good movie. Au casting de taille (avec de quoi tomber doublement amoureux entre Rachel McAdams et Emme Stone, remarquablement bien filmées) répondent des personnages profondément simples -jamais simplistes- et beau. Les relations qu'ils entretiennent façonnent d'ailleurs à elles-mêmes l'intérêt de tout le film, rendant plus ou moins superflu l'intrigue qui vient s'ajouter dessus, sûrement le plus important défaut du film. Mais qu'importe, c'est une sucrerie cinématographique qui vaut largement le détour, un film apaisant comme le cinéma américain n'en fait que trop peu, avec en prime, une des plus belles scènes (muette, de surcroît) de l'année.

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Jusqu’en Enfer, de Sam Raimi (2009)

Retour à « l’horrifique » (toujours entre guillemets) gagnant pour Sam Raimi, qui une fois de plus ne semble pas avoir perdu le mojo. Jusqu’en Enfer assure non seulement le haut niveau de divertissement propre à son auteur, mais toujours la certaine intelligence qui le caractérise : rien n’est jamais gratuit, ou quand ça l’est Raimi en joue évidemment. On y travaille les personnages et l’ambiance, à travers une mise en scène évidemment costaude, pour que le film ne se se résume jamais à un fade massacre de ses protagonistes comme la moyenne actuelle du genre le voudrait. Jusqu’en Enfer n’est certes pas dans les œuvres majeures de Raimi (peut-être parce qu’il fait plus redite que ses autres films), mais quand même, il y a de quoi valoir le détour dans ce trip horrifique assuré du début à la fin (et avec une sacrée fin !).

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Fat City, de John Huston (1972)

Le Nouvel Hollywood à son paroxysme, c’est sans aucun doute Fat City. Bien sûrement le film le plus noir et déprimant de John Huston, c’est quelque part l’ « anti » Rocky. C’est un film où l’on surnage comme l’on peut d’échec en échec dans un univers où le rêve américain semble absent, ou tout du moins égaré. Si Jeff Bridges en impose en jeune loup, c’est surtout Stacey Keach (acteur malheureusement bien sous-estimé) qui vole la vedette, campant un personnage totalement échoué dans les abîmes de la dépression, qui au fur et à mesure de sa lutte, sombre encore plus… Par-dessus on retrouve évidemment la réalisation du grand maître classique hollywoodien, comme une petite baffe à tous les petits nouveaux qui leur dirait « moi aussi, des films comme ça, je peux en faire ». La classe.

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La Route des Indes, de David Lean (1984)

Étrange que ce dernier film de David Lean. On retrouve évidemment toute l’ampleur des fresques du cinéaste britannique, mais il y a là quelque chose de plus, quelque chose d’assez étonnant qu’il effleurait parfois dans Lawrence d’Arabie : une essence mystique. La Route des Indes apparaît alors comme une belle œuvre sur le karma, presque un testament d’un vieux dinosaure. Et même si c’est un film qui n’est quelque part plus dans son temps (David Lean ne se reconnaissant plus dans la tournure moderne que le cinéma a pris après les années 60 et 70), c’est tout de même assez grandiose, pas loin d’être aussi magnifique que les autres Lean. Une découverte assez étonnante, au ton plutôt inattendu, mais qui clôt d’une jolie manière une des plus grandes carrières du cinéma.

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Razzia sur la chnouf, d’Henri Decoin (1954)

Encore un superbe cas de figure de film noir à la française, porté évidemment par son fort beau casting (Jean Gabin et Lino Ventura, mais aussi Magali Noël, d’ailleurs récemment décédée), mais surtout par un brillant scénario offrant au passage de sacrées répliques à ses protagonistes. Razzia sur la chnouf, c'est surtout son ambiance. Et ladite ambiance, évidemment paramètre majeur du genre, est réussie comme jamais, dans ces rues de Paris enfumées et ces troquets de mafiosis comme on en fait plus. Pour couronner le tout, un final encore parfait, finement ponctué par une punch-line bien Gabin comme il faut : « J’suis là, eh pourri ! ».

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Les Briseurs de barrage, de Michael Anderson (1954)

Un excellent exemple du film classique se focalisant sur un fait historique peu connu pour le retranscrire de manière honnête et efficace. Quelque part, Les Briseurs de barrage, c’est tout l’inverse du récent et atroce The Imitation Game. Michael Anderson explore alors pleinement la géniale opération qu’il décrit dans son histoire. Surtout que si l’on excepte les effets spéciaux un peu vieillis des tirs de FLAC, le film est tout de même visuellement sacrément réussi, mettant totalement à l’honneur les appareils de l’opération. Sans qu’il n’y ait de surplus d’inventivité particulier dans la réalisation, c’est un film qui parvient à être constamment intéressant, efficacement réalisé et solidement interprété.

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Arrête-moi si tu peux, de Steven Spielberg (2002)

Revisionnage

Le début des années 2000 forme tout de même un sacré âge d’or pour le père Spielberg, enchaînant chef-d’œuvre sur chef-d’œuvre ou pas loin. Arrête-moi si tu peux parvient encore à transcender l’essence du cinéma classique spielbergien (ici sous la forme du biopic) avec un film diablement virtuose et une fois de plus brillamment écrit. Et à l’heure des biopics bien ternes et sans âme tristement taillés pour les Oscars, le film de Spielberg reluit encore davantage. Car s’il adapte bien sûr une histoire de base géniale, il ne s’y perd jamais, il ne compte pas simplement dessus pour réussir son film. Il réunit tous les éléments pour que le résultat soit brillant, inégalé, de son casting de choix, dirigé d’une main de maître comme il en a le secret (même Tom Hanks !) à sa maîtrise unique de la forme, entouré par ses géniaux collaborateurs habituels, John Williams à la musique et Janusz Kaminski à la photographie, Michael Kahn au montage… Bref, l’exemple-type, une fois de plus, de comment Spielberg parvient à sublimer le classique, et en tirer quelque chose que bien peu d’auteurs hollywoodiens (si jamais il y en a encore…) arrivent à faire. Vivement Le Pont des Espions !

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Le Grand silence, de Sergio Corbucci (1968)

Il ne fallait jamais que quelques scènes de La Prisonnière du Désert pour se rendre compte que le western enneigé fonctionne immédiatement. Dans Le Grand silence, Corbucci affine l’atmosphère qu’il avait dans Django, ici plus mélancolique, poétique, mais aussi quelque part plus sèche en dépit du climat. Alors évidemment, c’est avant tout un duel de gueule, c’est avant tout Trintignant face à Kinski, de quoi faire tenir un film entier. Mais avec la liberté permise dans le western italien, Corbucci travaille une histoire plus originale, totalement détachée de quelconques stéréotypes et à la fin que l’on n’aura pas forcément vu venir, comme une sacrée baffe. Et puis, pour ne pas jurer avec le reste, Morricone y signe une de ses plus grandes partitions de western. Dans le top du spaghetti.

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Les pirates du métro, de Joseph Sargent (1974)

Comme beaucoup, je n’ai vu que le remake du regretté Tony Scott, sympathique série B quoi qu’un peu mineure dans la carrière (sous-estimée) du réalisateur. L’original, Les Pirates du métro (de son superbe titre français, cela va de soi), a quant à lui toutes les caractéristiques du polar des années 70, bien ancré dans un esprit de Nouvel Hollywood. Le héros, génialement amorphe, campé par le grandiose Walter Matthau, donne le ton d’un film capté sur le vif. L’intrigue, évidemment simple, marche néanmoins remarquablement très bien grâce à l’excellent travail d’écriture sur les personnages. En face, parmi les preneurs d’otage, le charismatique, froid et méthodique Robert Shaw en impose. Bref, une jolie petite pépite du genre qu’il ne faudrait pas oublier.

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Fahrenheit 451, de François Truffaut (1966)

Revisionnage.

Bien que les cinéastes de la Nouvelle Vague se soient focalisés sur le monde contemporain, la perspective de la science-fiction les a vraisemblablement toujours attirés. Ainsi, quelque part, Fahrenheit 451, plutôt mésestimé dans la carrière de Truffaut, forme une sorte de diptyque du genre avec Alphaville de Godard, sorti l'année d'avant. Ce qui est très intéressant, c’est que dans ces univers futuristes dépouillés (peut-être un peu fauchés aussi), on va droit au but. Et alors le film devient intemporel, en dépit même de ses fulgurances kitchs et bien datées (qui toutefois ont leur charme). Fahrenheit 451 est simple mais très beau. Comme la musique de Bernard Hermann qui l’accompagne, d’influence –évidemment- hitchcockienne mais largement moins sophistiquée qu’à l’accoutumée, plus harmonieuse peut-être. Un esprit qui reflète bien l’essence du film de Truffaut, sombre et glauque, mais à l’acte final d’un optimisme salvateur.

Fiche Cinelounge


Du rififi chez les hommes, de Jules Dassin (1955)

On imagine sans problème Melville s’identifier comme jamais devant un film comme Du rififi chez les hommes : des hommes tristes, une ville terne, un braquage mutique, des chapeaux et des impers… Le film de Jules Dassin, alors de passage dans le paysage cinématographique français, porte bien son qualificatif de noir. Désespérément noir, même. Et surtout, très moderne. Moderne comme la démarche de ses personnages, réels, jamais surjoués ou surécrits, moderne comme son ton photographique, moderne dans sa sobre et remarquable réalisation. En somme, du cinéma qui a la classe, du cinéma comme, une fois de plus, on n’en fait plus, comme on ne sait plus en faire semblerait-il.

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Classe tous risques, de Claude Sautet (1960)

J'aime Claude Sautet, j'aime la simplicité de ses films et par-dessus tout les relations qu'y entretiennent ses personnages. Classe tous risques fonctionne à nouveau sur cette alchimie simple mais belle car avant tout emmenée par les comédiens qu'il faut : Ventura et Bébel. Quand bien même l'histoire est sûrement moins intense que dans les films plus tardifs du réalisateur, elle a tout de même de quoi proposer une belle aventure, quasiment "familiale" qui plus est. C'est un joli film d'amitié et de devoir, c'est du cinéma français comme on l'aime.



J'ai rencontré le Diable, de Kim Jee-Woon (2010)

J'entre dans un cycle de cinéma sud-coréen, afin de rattraper un peu tout ce courant qui m'a plutôt échappé jusqu'à présent. J'ai rencontré le Diable compile quelque part les archétypes cinématographiques qui façonnent le genre de thriller si spécial qu'affectionne ce pays : le drame d'un couple, la mort violente, la torture, le serial-killer, l'ambiance pesante... Mais tous ces "artifices", le film de Kim Jee-Woon les met au service de sa réflexion sur justement la violence gratuite, et quelque part, le surplus de "colère" que contient son cinéma national. Et quelque part c'est très fort d'avoir des scènes aussi intenses graphiquement (doux euphémisme) tout en étant capable de se mesurer encore, de réfléchir sur ce que l'on montre, pourquoi on le montre, et ce que cela engendre. Quant au reste, si évidemment il faut saluer les comédiens (dont le génial Choi Min-sik), la mise en scène de Kim Jee-Woon n'est elle pas en reste, inquiétante et atmosphérique, où chaque mouvement de caméra est pensé pour procurer une émotion particulière. 




Star Wars : Épisode IV : Un Nouvel Espoir, de George Lucas (1977)

Revisionnage.

Contrairement aux autres épisodes de la trilogie originale, je n'avais pas revu l'épisode IV depuis plus d'une dizaine d'années. En le redécouvrant, il y a de quoi être encore abasourdi par cette épique aventure galactique, qui malgré toutes ses imperfections (qui contribuent cela dit à son charme) fonctionne encore redoutablement bien. Dans Un Nouvel Espoir, George Lucas a finalement assez subtilement compris comment utiliser les grands archétypes dramaturgiques au service d'un cinéma plus jeune, plus dynamique, boosté en toile de fond par le contemporain Nouvel Hollywood. Sans nostalgie aucune, l'épopée est encore très belle, le concept est frais et parvient à proposer des personnages toujours entraînants, et des situations qui se prêtent à une mise en scène certes simple mais soignée de la part de Lucas. Et puis, le coucher des deux soleils au son de John Williams, il y a de quoi tenir un film rien que sur cela.



Star Wars : Épisode V : L'Empire contre-attaque, d'Irvin Kershner (1980)

Revisionnage.

On a tout dit sur L'Empire contre-attaque, c'est bien sûrement le meilleur volet de la saga et il figure sans doute au panthéon du space-opéra. Mais si le changement de ton fonctionne aussi bien dans le volet signé Kershner, c'est surtout parce qu'il est finalement très complémentaire de l'épisode IV, parvenant à étoffer l'univers avec un autre regard, sans sombrer dans une redite qui pourtant était envisageable. Le film multiplie les passages de bravoure plus ou moins encore inégalés (la bataille de Hoth fait toujours un sacré effet) tout en travaillant la tragédie qui se profile dans l'histoire. Les personnages prennent de l'épaisseur, le manichéisme se désamorce doucement et tout l'univers paraît plus vivant, plus complet. Le must de ce qu'a comme potentiel la saga, l'équilibre parfait entre l'épique et l'intime, qui, trente-cinq ans après, apparaît toujours comme un modèle du genre.

Fiche Cinelounge


Star Wars Épisode VI : Le retour du Jedi, de Richard Marquand (1984)

Revisionnage.

L'opus de Richard Marquand, souvent un peu malmené car dans l'ombre de son prédécesseur, compile pourtant un certain nombre de réussites qui ont de quoi le laisser pas loin d'être aussi mémorable. Le retour du Jedi est un film constamment ou presque épique, techniquement encore à toute épreuve et malgré tout imparable dans son écriture, aussi classique soit-elle. On pourra toujours arguer que le final avec les Ewoks paraît décevant, et pourtant c'est tout de même une conclusion bien efficace, aussi facile soit-elle, pour une saga qui gardait malgré tout un air bon enfant. Et ce serait tout de même oublier l'affrontement final sur l'Etoile Noire, remarquable et puissant, porté par une des plus grandes compositions de John Williams, rien que ça, ou encore une bataille spatiale virtuose qui n'a pas forcément eu beaucoup d'équivalents depuis.

Star Wars : Épisode I : La Menace fantôme, de George Lucas (1999)

Revisionnage.

Si je me suis lancé avec plaisir dans le revisionnage de la trilogie originale, j'appréhendais peut-être davantage -comme beaucoup il faut croire- celui de la prélogie. Néanmoins, avec le temps qui a passé et l'acceptation de ces films, j'ai fini par tous les revoir plus ou moins à la hausse. Si La Menace fantôme, qui ouvre la marche, présente toujours sa kyrielle de défauts, de ses extravagances visuelles parfois un peu trop avant-gardiste à son ton trop bon enfant (ce coup-ci sans doute bien plus qu'Un Nouvel Espoir), il y a cependant de quoi être tout de même séduit par l'ampleur proposée et malgré tout la fraîcheur de l'ensemble, aussi bancal soit-il. Le problème étant finalement que chaque bonne idée (et il y en a) se voit systématiquement ou pas loin entachée par une autre fort mauvaise. Reste cette course de pod-racers toute droit tirée de Ben-Hur, sans doute scénaristiquement pas très cohérente et un peu gratuite, mais encore très impressionnante, et bien entendu ce combat final dont on a tant parlé, qui pour le coup est une grande réussite du film, qui malheureusement ne sera pas renouvelée dans les opus suivants. Toujours mitigé, mais j'y entrevois sûrement davantage les qualités et l'ambition de George Lucas qu'autrefois.

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Star Wars Episode II : L'Attaque des clones, de George Lucas (2002)

Revisionnage.

Un cas plus compliqué. L'Attaque des clones est probablement le volet le plus raté de Star Wars. Parallèlement, c'est aussi l'un des plus ambitieux, et c'est dans cette soif d'ambition qu'il se perd parfois. Passé une scène d'ouverture catastrophique, le scénario se retrouve être anecdotique, alors que l'histoire en elle-même devrait être importante. Et même si l'ambition de Lucas est avant tout le visuel, aussi audacieux soit-il parfois, l'ensemble est plombé par un film aux enjeux faibles, trop mal écrit, trop mal dialogué pour réellement fonctionner. C'est dommage car les germes de la réussite sont là, le film en lui-même est une révolution technique, ce qui n'est jamais rien, l'histoire pourrait être intéressante, l'incursion de Christopher Lee donne forcément envie, la bataille de Geonosis est intéressante et John Williams délivre toujours de grandes envolées lyriques... Mais on en revient à un film plutôt raté, qui, toutefois, trouve à mes yeux aujourd'hui plus de grâce qu'autrefois, ne serait-ce que par sa soif d'ambition et son refus de se reposer sur des acquis.

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Star Wars Episode III : La Revanche des Siths, de George Lucas (2005)

Revisionnage.

C'est finalement sur La Revanche des Siths que les expérimentations de L'Attaque des clones ont vraiment porté leurs fruits. Cette fois-ci, George Lucas ne se désintéresse pas du récit, bien qu'il conserve une écriture relativement balourde et toujours aussi mal dialoguée, et arrive, pour le coup, à concilier les ambitions dramaturgiques de la saga avec ses fantasmes visuels. Bien que conservant mille et un défaut (c'est d'ailleurs peut-être le volet où Nathalie Portman -qui n'a jamais brillé- joue le plus mal, peut-être plus mal qu'Hayden Christensen, c'est dire), c'est celui qui se révèle le plus équilibré à quasiment tous les niveaux. La scène d'ouverture, démente, donne le ton quant à l'ampleur du film, et l'intérêt demeure jusqu'à la fin ou pas loin, malgré les longueurs et autres séquences d'explications parfois peu convaincantes. Et bien que les multiples combats finaux sombrent parfois un peu dans le n'importe-quoi, la conclusion en elle-même du film, liant les deux trilogies, demeure la vraie réussite : sans trop en faire, George Lucas parvient à faire du vrai cinéma dans cet acte final muet où il peut enfin se recentrer sur ses enjeux. Il aura fallu du temps pour l'accepter, mais avec un peu de recul, c'est tout de même un beau moment de bravoure.

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L’Éclipse, de Michelangelo Antonioni (1962)

Amateur d'Antonioni sans être toutefois connaisseur, il était impératif que je finisse par découvrir l'une de ses œuvres les plus majeures, L’Éclipse. Avant toute chose, on remarquera comme à l'époque, Alain Delon a bien su s'entourer et se tailler une carrière avec un nombre de grands maîtres dont peu de comédiens peuvent se vanter. Ici, c'est sans doute un de ses plus grands rôles, car il faut le voir, suractif, gambadant partout en trader maladif. Les scènes de bourse sont incroyables, au dynamisme qui paraît presque inédit pour Antonioni, qui les confronte à sa langueur plus traditionnel. C'est un beau film de contrastes, qui viennent renforcer son inimitable atmosphère. Toute la dernière partie entre dans une dimension au style encore plus prononcé, avec cette ville prenant des airs de western désolé, qu'évidemment, la caméra d'Antonioni vient épouser comme personne d'autre ne le fait, dans une photographie en noir et blanc marquante, qui force le respect, et achève ce grand film.

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The Chaser, de Na Hong-Jin (2007)

Si The Chaser n'innove pas forcément au sein du thriller sud-coréen, il peut se fendre de l'efficacité record qui transcende habituellement le genre. Comme à l'accoutumée, le postulat de départ pose les bases de personnages autant singuliers que gauches, qui contribuent, d'une manière ou d'une autre, à construire l'atmosphère glauque, pour ne pas dire morbide, du film. L'interprétation géniale, notamment porté par Kim Yun-Seok (récemment remarquable dans Sea Fog), fait toujours mouche et permet au spectateur d'être saisit constamment à la gorge. Une fois de plus, un très chouette modèle du genre qui achève un peu plus le canon si particulier du genre en Corée du Sud, ce pays où les détraqués sont les rois du 7ème art.

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Ricky Bobby, le roi du circuit, de Adam McKay (2005)

De la comédie américaine impertinente et grasse comme on l'aime. Ricky Bobby, c'est évidemment la version arriérée du très bon Jours de Tonnerre de Tony Scott. Il y a une idée géniale qui se prête à faire de la bonne mise en scène (bien que celle-ci ne soit jamais transcendante non plus) de courses de voiture tout en s'en donnant à cœur joie sur la société américaine. D'un côté, Will Ferrell et le génial John C. Reilly se lâchent dans leurs personnages dégénérés, de l'autre Sasha Baron Cohen s'éclate dans sa parodie de pilote français gay, Jean Girard, résolument hilarante (l'accent y est aussi pour beaucoup). Bref, sans que ce soit non plus particulièrement original, c'est un film où il fait bon vivre, qui a de quoi astiquer nos zygomatiques (parfois très longuement !), et en plus il y a Amy Adams. Joie !

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La Stratégie Ender, de Gavin Hood (2013)

Voilà un projet qui déjà, sur le papier, a tout pour être mauvais : une fausse-bonne idée, un réalisateur calamiteux, un Harrison Ford "plus-has-been-tu-meurs" et Ben Kingsley. Car aussi malheureux cela soit-il, il faut bien s'avouer que neuf fois sur dix la présence de Ben Kingsley indique une catastrophe. Et La Stratégie Ender, sorte de ré-adaptation juvénile et attardée de Starship Troopers sur fond de jeu vidéo, en est une. Terriblement mal écrit, le film étale sa galerie de personnages insipides, ressassant sans fin les grands poncifs du genre. Ainsi, c'est un film où le méchant "bully" de l'académie militaire, en plus d'être très méchant, est laid. Et bête. Les inénarrables archétypes de l'aventure répondent tous à l'appel alors que l'on s'ennuie ferme dans ce film où rien d'intéressant ne se passe vraiment. La réalisation, trop plate pour cacher la faiblesse ambiante du production design et de toute la direction artistique, ne peut pas compenser quoi que ce soit. Tout au mieux, on retiendra les quelques efforts de la composition musicale de Steve Jablonsky. Un blockbuster déjà oublié, en somme.

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JSA (Joint Security Area), de Park Chan-Wook (2000)

La fameuse Joint Security Area est quelque chose qui fascine depuis longtemps, zone symbolisant le déchirement-même que connait la Corée, connue pour ses images aussi fortes qu'absurdes de ces soldats qui se font face toute la journée. Évidemment un endroit aussi fort, source de tout un traumatisme, est l'endroit idéal pour un film et Park Chan-Wook l'a bien compris. D'autant plus que JSA pourrait se présenter comme une sorte de polar presque bas-de-gamme sur fond d'investigation militaire, mais l'intrigue n'est que prétexte pour le réalisateur coréen à revenir sur les vrais enjeux dramatiques de son film et de son contexte. Et alors, il devient magnifique, d'une beauté vraiment rare et plus importante encore, c'est un film qui communique de l'espoir, malgré la tragédie qu'il décrit. Le traitement de l'amitié, source du salut, rappelle la thématique-fétiche de John Woo, sans doute une inspiration de l'auteur coréen. Peut-être pas subtil, mais tellement d'actualité qu'il devient sans doute un film nécessaire, aussi maladroit soit le qualificatif, dans le cinéma coréen. Sans distinction.

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King Rising, de Uwe Boll (2006)

Le voilà, le fameux blockbuster du tant aimé (et très sympathique) Uwe Boll ! C'est quelque chose. Mais avant tout, on doit se demander qui n'avait que cela à faire de financer à l'ami Boll un film à 80 millions de dollars ? Car sans surprise, King Rising est un navet galactique qui réussit tout de même l'exploit de dilapider son budget sans que cela se voit à l'écran. Alternative cheapissime au Seigneur des Anneaux, le film fait presque amateur. Ç’aurait pu être drôle si ça n'était pas aussi interminable. Tout y bat des records, de cette laideur de l'image insondable à ces costumes hideux façon cosplay, le casting totalement à la rue (Burt Reynolds, sérieusement...), la mise en scène évidemment atroce. Il n'y a pas à dire, Boll s'est surpassé. Pour couronner le tout, on se peut tout de même se délecter de ces amazones sauvages et sylvestres au décolleté fort intéressant, ou encore, pour les plus fougueux d'entre nous, des ninjas de l'armée royale. Car oui, il n'y a pas de nanar sans ninjas. Cosmique.

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Hulk, d'Ang Lee (2003)

Revisionnage.

Si j'avais profondément détesté le Hulk d'Ang Lee à sa sortie, je le revois aujourd'hui légèrement à la hausse sans le trouver résolument réussi pour autant. Est-ce parce que les films de super-héros qui sortent aujourd'hui sont bien pires la plupart du temps ? C'est une éventualité. Bref. Ang Lee a tout de même bien saisi le potentiel de son personnage et les enjeux dramatiques de Bruce Banner (hélas très fadement campé par Eric Bana). De la sorte, il s'offre éventuellement d'assez jolies séquences malgré l'inévitable coup de vieux du film, ou encore ses élans de montage assez discutable bien que l'idée en elle-même soit louable. Car si les effets de montage sont un gimmick désormais connu chez Ang Lee, ici il abuse du procédé jusqu'à le rendre parfois un brin ridicule, d'autant plus que la technique n'est pas bien convaincante. L'idée aurait cependant vraiment pu être excellente si l'effet appliqué se rapprochait de celui utilisé dans la director's cut des Guerriers de la nuit de Walter Hill. Le reste de la réalisation est hélas beaucoup plus anodin, éventuellement ponctué par une partition de Danny Elfman sympathique sans être transcendante. Dommage que le final, vraisemblablement au cœur d'un problème de production, soit aussi inachevé. Donc, malgré tout, encore un peu mi-figue, mi-raison au sujet du film.

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Hard Day, de Seong-hoon Kim (2014)

Hard Day a de quoi laisser malheureusement un peu dubitatif, car passé tout un premier acte vraiment très réussi et excellemment mené, l'idée de base cache finalement un rouage scénaristique beaucoup plus convenu et la fraîcheur qu'apportait à priori le film s'estompe doucement. La journée de merde douloureusement traversée par le protagoniste principal suffit tout de même à rendre le film hautement sympathique, dans sa manière qu'il a à jouer avec les codes (désormais bien connus) du thriller sud-coréen, avec une touche d'humour noir qui est toujours le bienvenu, évidemment. Une petite production pas mémorable, mais tout de même plaisante en dépit de cette semi-déception, compte-tenu du potentiel du premier acte.

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Le Septième juré, de Georges Lautner (1962)

Sans aucun doute le film le plus sombre et glauque de Lautner. Mais Le Septième juré, c'est avant tout le projet très personnel de Blier, qu'il est même allé tourné dans son propre village. Les vingt premières minutes sont terrifiantes dans leur description de cette France un peu malade qui se croit bien portante. Sentiment qui atteint évidemment son paroxysme lors du fameux meurtre au son de Vivaldi. Blier y est terrifiant comme jamais il ne l'aura été. Par la suite, c'est une longue et lancinante descente aux Enfers, dans les abimes d'une société pourrie et corrompue à l'issue évidemment tragique et inéluctable. Dans un genre quasiment similaire, on pourrait penser à l'excellent Enquête sur un citoyen au-delà de tout soupçon d'Elio Petri. Bref, un grand film comme, pour changer... on en fait plus.

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Loin de la foule déchaînée, de John Schlesinger (1967)

Avec la sortie récente de la nouvelle adaptation signée Thomas Vinterberg, il était impératif que je vois la précédente faite par John Schlesinger. C'est assez curieux, puisque les deux versions se ressemblent plutôt, mais finissent par procurer un sentiment très différent. Loin de la foule déchaînée selon Schlesinger est une œuvre beaucoup plus naturaliste, peut-être davantage versée dans la fresque historique que le Vinterberg, autrement plus condensé et surtout plus romantique. On retrouve toutefois la grande beauté formelle qu'incombe le fait d'adapter Thomas Hardy, et on notera au passage que Vinterberg n'est parfois pas allé fort loin pour chercher l'inspiration des plans de sa version. Toutefois, encore une fois, les deux ont une identité très différente. En revanche, la beauté naturelle de Julie Christie ne compense pas la faiblesse de son jeu, parfois un brin pénible, surtout face à ses acolytes masculins, tous remarquables, encore plus pour l'immense Terence Stamp, sublime, devenant la réelle star du film. Pas aussi émouvant et réussi que la nouvelle adaptation, donc, mais c'est un autre regard assez intéressant, voire même assez instructif sur l'adaptation en général.

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La Guerre du feu, de Jean-Jacques Annaud (1981)

Revisionnage.

Plus de trente ans après La Guerre du feu, on doit pouvoir encore compter les films  abordant la préhistoire (hors animation ou comédie) sur les doigts d'une main, ou pas loin. Pourquoi ce registre, pourtant passionnant sur le plan culturel et historique est-il aussi déserté ? Allez comprendre. Jean-Jacques Annaud saisit pourtant parfaitement tout le potentiel cinématographique dont il regorge : car c'est un "genre" où les enjeux sont puissants et universels (ici, la quête du feu, quoi de plus génial ?), visuellement ébouriffant et surtout intellectuellement riche dans sa description des prémices de l'humanité. Le feeling du film est unique et Annaud, compositeur pictural hors-norme, sait d'ailleurs l'imposer dès les premiers plans : le voyage temporel est immédiat. Brut de décoffrage, le film ne s'empêche pas toutefois quelques magnifiques séquences, dont évidemment la très forte rencontre avec les mammouths, que vient magnifier la composition de l'immense Philippe Sarde. Le film le plus unique de l'aventurier Jean-Jacques Annaud, vestige d'un cinéma perdu.

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Mensonges d'Etat, de Ridley Scott (2008)

Revisionnage.

Sous ses airs de Ridley Scott efficace mais mineur, Mensonges d’État a pourtant toute sa place dans sa filmographie : volet agissant en diptyque avec La Chute du faucon noir, variant autour de la thématique "États-Unis police du monde : l'échec", et suite de Kingdom of Heaven, scénarisé également par William Monahan, qui se concluait sur des cartons introduisant la situation du présent film. Film hautement politique mais également thriller rondement mené, à la nervosité qui n'est évidemment pas sans rappeler celle du regretté frère Tony (la manière d'aborder la surveillance renvoie d'ailleurs évidemment au virtuose Ennemi d’État). Si bien entendu DiCaprio y brille, c'est aussi Russell Crowe qui domine le film, dans ce rôle d'homme de bureau façon Révélations qu'il sait si bien maîtriser. Bref, un film qu'il ne faut pas oublier dans une filmographie contemporaine bien dense.

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Memories of Murder, de Bong Joon-Ho (2003)

On m'avait dûment vendu Memories of Murder comme une des matrices de Zodiac de David Fincher. Pas de doutes sur le fait que l'auteur américain y soit allé cherché de grandes influences, mais c'est dire la qualité du film de Bong Joon-Ho. Dans ce thriller froid et sordide où l'on retrouve encore toute une galerie de grotesques ou pathétiques personnages (tous génialement interprétés), c'est -paradoxalement- la beauté ambiante qui s'en dégage qui finit par marquer. Parce que c'est sublimement bien réalisé, évidemment, mais aussi finement écrit : c'est là sans doute le plus subtil du genre, là où justement les Coréens n'y arrivent pas toujours. A noter, également, la très belle musique de Tarô Iwashiro, qui encore récemment, a récidivé dans le sublime The Crossing. Bref, au panthéon du thriller sud-coréen, assurément.

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Tarzan et sa compagne, de Jack Conway et Cedric Gibbons (1934)

C'est véritablement amusant de voir tous ces films américains antérieurs au code Hays, car ils ne loupent alors jamais une occasion d'être plus ou moins explicite notamment dans tout ce qui est érotique, et il faut dire que l'érotisme filmé façon Hollywood classique est d'une grande beauté. C'est sûrement tout l'intérêt de Tarzan et sa compagne, l'érotisme omniprésent qui se dégage de la relation entre l'homme-singe et la légendaire Jane. Au grand mythe de l'aventure répond donc ce grand mythe érotique, qui se conjuguent dans une scène sous-marine franchement très belle dans ce qu'elle montre sans l'avoir vraiment montré. Pour le reste, évidemment ça ne reste qu'un petit film d'aventures plutôt lambda, mais qui se découvre sans déplaisir, essentiellement grâce à ce beau binôme formé par Johnny Weissmuller (quel homme, au passage) et Maureen O'Sullivan. Un film qui donne toujours autant envie d'aller faire du trapèze en pleine jungle, en beuglant le cultissime cri de Tarzan.

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L'Amant, de Jean-Jacques Annaud (1992)

Revisionnage.

Jean-Jacques Annaud, c'est quelque part notre Werner Herzog national, notre aventurier cinématographique dont la carrière se disperse aux quatre coins du globes. Et c'est aussi pour cela qu'on l'aime, pour cette manière si spéciale qu'il a d'aller capturer des endroits du bout du monde avec un œil d'esthète emprunt de plein de romantisme. L'Amant, c'est exactement cela. En une poignée de plans Annaud réussit un voyage incroyable et surtout passionné. Et c'est justement son romantisme idéalisé qui transcende la magnifique histoire de Marguerite Duras (au prix d'une brouille avec elle, toutefois), couplé (c'est le mot) ici avec un érotisme à littéralement tomber par terre. Mais tout ceci ne marche peut-être que parce qu'Annaud filme le binôme idéal, à l'alchimie parfaite, entre l'innocente mais sensuelle Jane Marsch et le magnétique Tony Leung. Dans tous les sens du terme, L'Amant est une vraie aventure, et définitivement un des sommets de la cinématographie de son auteur, dont on ne se lassera jamais de savourer des images au charme inimitable, où l'ampleur d'un David Lean vient épouser une touche française plus intime.

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Le Sergent noir, de John Ford (1960)

C'est quelque part très intriguant comme les années 60 poussent John Ford à déconstruire la mythologie du western (à laquelle il a lui-même largement contribué évidemment), entre L'Homme qui Tua Liberty Valance, Les Cheyennes ou même un peu avant, Les Cavaliers, qui d'une manière ou d'une autre préfigurent un regard moderne sur des thématiques qui vont plus tard être au centre des préoccupations du Nouvel Hollywood. Le Sergent noir s'inscrit lui-aussi dans cette logique. Avant tout, quel régal d'avoir l'inimitable Woody Strode en vedette, sûrement plus que jamais magnifié par la caméra de Ford, qui en fait l'homme fort et viril du western par excellence, le survivant de l'Ouest... le vrai Américain, finalement. Et là-dessus le film est très moderne, il n'est pas dans une logique misérabiliste, alors que John Ford se lance littéralement à fond dans son sujet. Optant pour l'élégante forme du "film de procès" (toutefois allégé par les traditionnelles drôleries du cinéaste), il déconstruit avec finesse la thématique raciste, tant dans l'imagerie du western que dans la société américaine contemporaine. Et tout sonne juste. Si Jeffrey Hunter s'impose peut-être un peu moins, c'est surtout la sublime Constance Towers qui sera la co-vedette de Strode, confirmant qu'elle mérite bien plus que cette trop mince carrière.

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2 commentaires:

  1. Concernant "Aloha" de Cameron Crow, parles-tu de la scène de l'arrestation de Bill Murray quand tu évoques la plus belle scène de l'année ou bien celle de la rencontre père/fille de la fin ? (d'ailleurs je crois que tu as fait une faute : "avec en prime, un des plus belles scènes" ne serait-ce pas plutôt "une" ? )

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    1. La rencontre finale père/fille, à travers la vitre ! Ca m'a scotché ! (mais la scène avec Murray est chouette aussi)

      Merci pour la faute, je corrige !

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