samedi 25 octobre 2014

[Avis en vrac] Magic in the Moonlight (2014), Le Sixième Sens (1986), Le Solitaire (1981), Stalag 17 (1953), La Tempête qui tue (1940), Valdez (1971), Le Chasseur (2011), Attaque au Cheyenne Club (1970) et Les Fantastiques années vingt (1939)

AU CINÉMA


http://www.circlecinema.com/wp-content/uploads/2014/06/Magic-in-the-moon-light-poster.jpgMagic in the Moonlight, de Woody Allen (2014)

A ma plus grand surprise, et pour mon plus grand plaisir, Magic in the Moonlight est un fin millésime représentatif du meilleur de ce qu'est capable Woody Allen dans sa période moderne. On retrouve une énième fois, non sans plaisir cela dit, le personnage de Woody Allen derrière les traits de Colin Firth, mais au service ici d'une réelle histoire, d'intérêts qui frappent grâce à un enthousiasme et une beauté qui se dégage de l'image. Beauté qui évidemment trouve son reflet dans Emma Stone, qui prouve une fois de plus que Woody Allen sait filmer les belles jeunes femmes.

L'univers fantasmé par Allen est malin et capte tout l'intérêt du spectateur, à la fois concentré sur le magnétisme d'Emma Stone mais également à la recherche de la solution des fameux tours de passe-passe. Dans sa démarche de scénario, Allen se joue intelligemment de nous, tel un génie cynique. Génie d'ailleurs auquel il ne manque pas de se comparer à travers le personnage de Colin Firth : une sorte de prétention agréable et cocasse quand on connaît l'auteur. Savourable de bout en bout, et comme souvent, porté par une direction d'acteur d'une grande finesse.

A noter également la photo incroyable de Darius Khondji, toujours très tamisée en intérieur avec ces sources de lumière à l'intérieur de l'image, peut-être une des plus belles photographie dans un film (couleur, tout du moins) de Woody Allen.



EN VIDÉO

http://obxe.files.wordpress.com/2013/04/manhunter-poster.jpg
Le Sixième Sens, de Michael Mann (1986)

Revisionnage.

A l'occasion de la sortie prochaine de Black Hat, j'escomptais entreprendre une petite rétrospective Michael Mann. Après avoir revu plusieurs de ses films dont le fabuleux et sous-estimé Ali il y a quelques temps, je voulais me replonger dans ses années 80 si uniques et matricielles. Il y a bien des années que je n'avais pas vu Manhunter. Aucun doute : non seulement tout le cinéma de Michael Mann est contenu dans Manhunter, mais il s'agit en plus d'une adaptation remarquable, sachant que je tiens déjà en très haute estime l'excellent livre de Thomas Harris, Dragon Rouge.

C'est intriguant la manière avec laquelle Michael Mann ne se perd jamais d'un film à l'autre, et commence d'emblée avec ce qui caractérise son cinéma : c'est l'histoire d'un type qui va faire son boulot. Sculpteur d'une image à la fois curieusement léchée et sobre, dans ces grands décors candides et douteux, Mann tise l'un des films d'ambiance les plus précieux des années 80. Réponse incroyable au grand Los Angeles Police Fédérale (à propos duquel je soupçonne Friedkin d'avoir pillé la série Miami Vice du même Michael Mann), Manhunter est un immanquable de son auteur, qui est après tout l'un des meilleurs cinéastes américains contemporains. Rien que ça.

Je n'étoffe pas davantage, afin de garder autant que possible de matière pour des critiques plus étayées quand je ferais la rétrospective Michael Mann (du moins, si j'ai le temps !).

Fiche Cinelounge


Le Solitaire, de Michael Mann (1981)

Revisionnage.

Première incursion de Michael Mann dans la fiction de cinéma, après s'être expérimenté et perfectionné dans le documentaire et le téléfilm, Le Solitaire préfigure aisément les trois prochaines décennies de la carrière de son auteur. Peu de réalisateurs peuvent se vanter d'avoir des débuts aussi programmatiques. Ici, aucun doute, tout y est : de ces ambiances nocturnes ésotériques de Los Angeles soulignées par la bande-son fabuleuse (l'une de leurs meilleures) de Tangerine Dream (et quelque part cela préfigure également Elliot Goldenthal sur Heat) à cette histoire d'un type qui, encore une fois, fait son boulot. Ceci tout en conservant d'ailleurs le fin parallèle, très cher à Michael Mann, avec la vie intime.

Si les amateurs de Drive de Nicolas Winding Refn peuvent évidemment y trouver ici tout le modèle du cinéaste danois, les amateurs de Michael Mann trouveront le film qui fait, peut-être plus que jamais, le plus explicitement du moins, la connection avec ses influences. Par-là cette direction d'acteur scorsesienne, ailleurs ces ralentis montés en cut façon Sam Peckinpah, et évidemment ce héros de la ville taciturne, descendant du Samouraï de Jean-Pierre Melville. Comment ne pas accoucher d'un grand film ?

Comme pour Manhunter, j'en garde un peu pour la critique quand je ferai la rétro Michael Mann.

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https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiL5MFmTpK5CN9yJKRVilM-nq4udbaDLrJp8iRQzujU5nNtT4aU91qcbiX_5vkmcLZloLXYjFCMHUIkiCk9-E9rwylJcNVEOE1OFCtqmxLmDBNVpkhoXEwdBoJL4DcSGsuizrBxSTkyIIs/s1600/stalag-171.jpgStalag 17, de Billy Wilder (1953)

Le film de stalag, c'est vraiment un genre à part entière très grisant. Ce qui fait la différence sur Stalag 17, c'est notamment les talents d'écriture si fins et modernes de Billy Wilder. La manière avec laquelle il millimètre ses personnages et les dialogues dans la comédie (même si Stalag 17 est plus que cela) empêche tout superflu, toute perte des enjeux ou de l'efficacité du film.

Tout ceci est à la fois très juste et très drôle. Même si on peut tout de même se demander quelques fois si la lourdeur du personnage de Preminger (c'est quand même génial de le faire jouer par Preminger) est nécessaire, on se ravise après quelques gags hilarants (les bottes au téléphone). L'ambiance parfois bon enfant de l'ensemble rappelle évidemment Papa Schultz avant l'heure, tout en mesurant l'esprit afin que rien ne soit profondément déplacé ou facile, gardant un semblant de sérieux dans le traitement du film de stalag. En prime, un William Holden au cynisme délicieux, que du bonheur.

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La Tempête qui tue, de Frank Borzage (1940)

Mon premier Borzage, il était temps. Derrière cet abominable traduction française se cache un mélodrame américain (à une époque où les États-Unis ne sont pas encore en guerre) d'une actualité terrifiante sur son époque. Même si le sujet a été rabâché plein de fois depuis, la montée du nazisme reste tout de même un sujet fascinant et infini, surtout quand il est traité avec autant d'intelligence et de pureté que le fait Borzage. Les apparences manichéennes sont contrastées par un contexte décrit avec une certaine justesse. Le film ne cède pas à la facilité de condamner, mais constate simplement, avec effroi, un grand pays sombrer dans l'ombre.

L'idée de placer l'intrigue dans la campagne montagneuse et enneigée de la Bavière, évidemment berceau du national-socialisme, fonctionne remarquablement bien et confère au film une identité authentique et unique dans son univers, jusqu'à même pouvoir mettre en scène une très belle poursuite en ski. Les personnages sont caractérisés avec toute la beauté du genre mélo des années 40, certains pris dans d'affreux dilemmes, d'autres moins, et un James Stewart qui fait évidemment toujours plaisir à voir.

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Valdez, d'Edwin Sherin (1971)

Valdez m'a mis une petite claque que je n'ai pas vu venir. Je ne m'attendais pas à un western de vengeance aussi sec et extrême, orienté Nouvel Hollywood, violent comme un Robert Aldrich (je pense en particulier à Fureur Apache). C'est encore l'un de ces westerns où l'on ne peut pas faire plus simple dans l'histoire : le héros se retrouve confronté à son enjeu dès les premières minutes et jusqu'à la fin du film c'est ce qui va le motiver, sans jamais s'en détourner.

Voir une figure que l'on aime, aussi iconique que Burt Lancaster, se faire humilier est toujours quelque chose de terrible, surtout dans le western, impitoyable à ce sujet-là. Non content de simplement se prendre des coups de feu à côté des oreilles, il finit par trainer lamentablement une croix dans le désert, une des pires humiliations que j'ai vues dans un western américain depuis notamment Ceux de Cordura, qui trainait Gary Cooper plus bas que terre. Le segment consacré à la vengeance atteint des dimensions absolument incroyables, Valdez tuant tel une machine ou menaçant les vivants, "Valdez is coming" dit-il lui-même. La métamorphose du héros est d'autant plus impressionnante quand on voit le point de départ de Valdez, ce Lancaster cassé et traité comme un moins que rien de métèque. Tout ceci jusqu'à un dénouement absolument incroyable que je n'ai pas vu venir non plus. Puissant.

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Le Chasseur, de Daniel Nettheim (2011)

Un DTV extrêmement plaisant, car bien que sans surprises, Le Chasseur offre exactement ce que l'on est venu chercher, avec de la générosité et de la maîtrise en sus. Pas de place pour l'ennui, les enjeux sont expédiés le plus rapidement possible pour faire place au plus important : voir le charismatique Willem Dafoe crapahuter dans la forêt en prédateur. A ce sujet-là, le réalisateur tient vraiment bien le "personnage" sylvestre et fait du Chasseur un film à la beauté bienvenue.

Dommage que le dernier tiers se perde peut-être dans son rythme, avec ces incursions de scénario qui paralysent peut-être la pureté de l'ensemble, mais rien n'est profondément raté et au-delà même du domaine forestier, les séquences de vie dans ces endroits perdus de l'Australie passent vraiment bien. Sobre, beau et plutôt direct, avec un Sam Neill en prime, mais que demande le peuple ?

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Attaque au Cheyenne Club, de Gene Kelly (1970)

Un western réalisé par Gene Kelly, c'est plutôt cocasse non ? Grosso modo c'est l'histoire du western classique, représenté par James Stewart et Henry Fonda, qui rencontre la mode dévergondée typique des années 70. C'est à la fois osé sans trop l'être, car Gene Kelly ne montre pas grand chose en fait, la déprave se joue au niveau de dialogues parfois assez drôles tant ils tournent autour du pot pour décrire ce que l'on ne veut pas montrer. Du coup l'ensemble se suit de manière plutôt plaisante, un sourire aux lèvres.

Cela dit, le problème est que c'est plutôt vieillot. On est en 1970 et Gene Kelly, qui pourtant parle d'univers dévergondé, semble mettre en scène son western comme un classique des années 50, ce qui n'est pas toujours très emballant. Et si j'ai trouvé Henry Fonda plutôt agréable derrière ses airs nunuches, j'ai été sceptique face au cabotinage de James Stewart (qui est un acteur que pourtant j'adule !). Rien de profondément déplaisant mais rien de bien ambitieux non plus, si ce n'est la joie de profiter de toute une flopée de jolies filles aux vêtements parfois légers.

Reste une fin où je n'ai pas forcément saisi où Gene Kelly voulait en venir, à croire qu'il n'est pas allé au bout de son idée de confrontation des univers, dommage.

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Les Fantastiques années vingt
de Raoul Walsh (1939)

Désormais aucun doute sur le fait que Martin Scorsese se soit dit que sa remarquable série, Boardwalk Empire, serait ni plus ni moins que la descendance de The Roaring Twenties (quel titre, quel époque !). Énième grand film signé Raoul Walsh, on ne peut être qu'emballé par la radicalité du discours et son efficacité moderne à tous les niveaux. D'une transition à l'autre, les idées de montage pullulent et l'atmosphère de l'époque se fait ressentir comme jamais, avec au passage quelques emprunts au Scarface d'Howard Hawks, à grands coups de Tommy Gun.

Le charisme implacable de James Cagney rivalise sans difficultés avec Bogart, grâce à un personnage terriblement bien écrit. A ce propos, tout le prologue pendant la première guerre mondiale est fort bien pensé et sert complètement les personnages, avec cette habitude de l'arme et de la violence que désormais les américains ramènent dans les grandes villes, comme le souligne le personnage de Bogey, disant qu'il va ramener son fusil au pays. Le détail qui en dit long sur la force incisive du film.

Schéma classique de l’ascension et de la chute n'empêchant pourtant aucunement un grand film, se concluant de la manière la plus forte qui soit, belle et terrible à la fois. "He used to be a big shot" est une réplique qui marque.

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